Introduction

Suite à l’affaire des Panama Papers, les Ministres des finances et des impôts de Nouvelle-Zélande, Hon Bill English et Hon Michael Woodhouse, ont chargé un expert indépendant, M. John Shewan, ancien employé de PricewaterhouseCoopers, pour déterminer si les normes existantes (celles-ci datent de 2006) en matière de trusts non-résidents sont suffisantes en l’état ou si elles doivent faire l’objet de modifications afin d’assurer la bonne réputation de la place financière.

En effet, d’après les médias locaux, Mossack Fonseca aurait créé des centaines de trusts offshores afin de permettre à sa clientèle de cacher des fonds illicites ou provenant de l’évasion fiscale. Pour rappel, il existe environ 12’000 trusts étrangers en Nouvelle-Zélande.

Bien que le gouvernement ait la possibilité de demander aux trustees des informations sur les trusts qu’ils administrent, il appartient à ces derniers de procéder aux vérifications habituelles dans le cadre de l’autorégulation.

Le rapport Shewan a été publié fin juin 2016 : il énumère une liste de mesures visant à renforcer la transparence des trusts non-résidents afin non seulement de lutter contre le blanchiment d’argent et la fraude fiscale mais également de permettre la mise en conformité de la Nouvelle-Zélande avec les standards de l’OCDE.

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1. Le projet sur les trusts en détails

Une très large majorité des mesures mentionnées dans le rapport Shewan a d’ores et déjà été approuvée par le Gouvernement.

Celui-ci veut mettre sous toit la réforme dans les plus brefs délais et il est à prévoir que la nouvelle loi soit soumise au Parlement d’ici fin août 2016 déjà.

A compter du 1er avril 2017, les nouveaux trusts non-résidents auront l’obligation de s’inscrire dans un registre déposé auprès des autorités fiscales (Inland Revenue Department). Les trusts existants bénéficieront d’un délai transitoire au 30 juin 2017 pour procéder à cette démarche.

Par la suite, il est possible que la tenue de ce registre soit confiée à un bureau spécial comme le Companies Office, ceci afin de tenir compte de l’évolution rapide des normes internationales, notamment en matière d’échange automatique d’informations. L’inscription coûtera NZD 270 auxquels s’ajouteront NZD 50 de frais annuels.

Les informations qui figureront dans ce registre seront le nom, l’e-mail, l’adresse, le pays de résidence fiscale ainsi que le numéro d’identification fiscale des settlors, des bénéficiaires d’un fixed interest trust, des protectors, des trustees non-résidents ainsi que de toute autre personne physique qui détient un contrôle effectif sur le trust.

Le trust deed devra être annexé à la demande d’enregistrement qui consistera en une version étendue de l’actuelle forme IR 607.

S’agissant des trusts discrétionnaires, la classe de bénéficiaires devra être clairement décrite afin de pouvoir identifier chaque individu lors d’une distribution subséquente.

La Silver Fern

La Nouvelle-Zélande compte près de 12’000 trusts étrangers.

Par ailleurs, chaque année à compter du 1er avril 2017, les trustees devront soumettre un rapport annuel et informer les autorités de tout changement dans la structure. Ils auront également l’obligation de soumettre les états financiers du trust (dans les 3 mois dès la clôture des comptes) ainsi qu’un tableau des distributions effectuées en identifiant précisément les bénéficiaires (nom, adresse, numéro fiscal, pays de résidence fiscale etc.).

Bien que ces informations ne seront pas accessibles au public, elles pourront notamment être consultées par la police, les autorités fiscales (IRD), le Département des affaires internes ainsi que les autorités anti-blanchiment et de lutte contre le terrorisme (Financial Intelligence Unit of the New Zealand Police).

Les trustees ainsi que le settlor devront aussi signer une déclaration de consentement par laquelle ils autoriseront la transmission des informations aux autorités, y compris dans le cadre de l’échange automatique de renseignements entre les pays.

Les trusts qui ne se conformeront pas à ces obligations ne pourront pas bénéficier de l’exonération fiscale pour les revenus de source étrangère sauf s’il est prouvé que le manquement imputé est non intentionnel et corrigé immédiatement.

« A la différence de pays comme la France, le registre des trusts ne sera pas public mais accessible dans un premier temps qu’aux autorités. »

Enfin, des obligations de diligence plus strictes seront imposées aux trustees notamment s’agissant des vérifications sur l’origine des fonds et l’identification de l’ayant droit économique.

Des simplifications en matière de reporting et d’annonces à la police (Suspicious Transaction Report) sont également prévues.

Ces dernières modifications seront soumises au Parlement durant la première moitié de 2017.

2. Analyse critique

Alors que l’échange automatique de renseignements va entrer en vigueur pour la plupart des pays au 1er janvier 2017, on peut se demander si la Nouvelle-Zélande n’est pas en train de se tirer une balle dans le pied par la mise en place de ce dispositif lourd qui paraît à nos yeux superflu.

Tandis que les rendements des actifs sont déjà quasi nuls, ces mesures vont augmenter encore les coûts d’administration des trusts. Les clients ne vont sans doute pas continuer à payer des frais exorbitants pour des structures chères et complexes qui n’offrent même plus la garantie de la confidentialité à l’égard des tiers. En effet, au vu des informations étendues qu’il faudra fournir aux autorités, il sera beaucoup plus facile pour des tiers (créanciers, héritiers réservataires, etc.) d’obtenir des renseignements sur le trust.

Il n’est d’ailleurs pas certain que les pays concurrents (les Iles Cook, Labuan, Singapour, les Bahamas, etc.) aient la volonté de prendre la même direction que la Nouvelle-Zélande. Avec le Brexit également, il n’est pas exclu que le Royaume-Uni assouplisse sa règlementation en matière de trusts afin de rendre la place financière de Londres encore plus competitive.