Publié le 30 avril dernier dans le Journal Officiel d’Italie, le décret législatif (n.34) intitulé « Mesures urgentes pour la croissance économique et la résolution de crises particulières », surnommé « Decreto Crescita » (décret croissance), vient d’être converti en loi (n.58) le 28 juin 2019 avec des amendements à la clé.
Le gouvernement italien tente en effet de sortir son pays de la récession. La coalition au pouvoir en Italie a ainsi multiplié les avantages fiscaux dans l’espoir de relancer l’économie. Au total, 1,9 milliard d’euros sur 3 ans vont être alloués aux différentes mesures annoncées. En font notamment partie, le mécanisme d’impatriation qui améliore encore la fiscalité pour les résidents à l’étranger qui rentrent en Italie en transférant leur résidence fiscale, ceci afin de rapatrier dans le pays le « capital humain ».
Rappelez-vous. Fin 2018, l’Italie a introduit un régime fiscal ultra-favorable pour les nouveaux retraités aux côtés de celui des impatriés. A cela s’ajoute la « flat tax », bien plus avantageuse que le forfait fiscal suisse, qui permet de bénéficier d’une taxation plafonnée à 100’000 euros par an sur les revenus de source étrangère, et ce durant quinze ans.
Les retraités bénéficient aujourd’hui d’une taxation limitée à 7 % sur leurs revenus de source étrangère, à la condition de renoncer au crédit d’impôt accordé par les conventions de double imposition. Cette mesure, valable pour 5 années dès la date d’entrée en Italie, est applicable si la personne concernée vient s’installer dans une ville de moins de 20’000 habitants, située dans l’une des 8 régions du Sud de l’Italie (Sicile, Sardaigne, Pouilles, Calabre, Abruzzes, Campanie, Molise et Basilicate). Enfin, cette personne ne doit pas avoir été résidente fiscale en Italie durant les 5 années précédant sa prise de résidence et qu’elle ait été domiciliée dans un pays disposant d’une convention en matière d’assistance fiscale avec l’Italie.
Désormais, avec le « décret croissance », le régime applicable aux impatriés sera élargi dès 2020 et ne sera plus limité aux professeurs et aux chercheurs. Les avantages fiscaux s’appliqueront non seulement aux indépendants, aux salariés, aux propriétaires d’entreprises, y compris nouvellement crées, mais surtout aux personnes ne disposant pas forcément d’une qualification particulière. Ainsi, le champ d’application de la loi ne sera plus uniquement restreint aux individus diplômés ou exerçant une fonction dirigeante.
Ainsi, pourront bénéficier d’une taxation allégée tous les nouveaux impatriés (travailleurs et étudiants), sous réserve d’avoir vécu au minimum 2 ans à l’étranger (contre 5 auparavant), qu’ils soient italiens ou étrangers. S’agissant des 2 ans, il suffit que la personne ait travaillé hors de l’Italie de manière prédominante pendant cette période mais il n’est pas nécessaire que cela soit pour le compte d’une entreprise non italienne. L’inscription dans le registre des italiens domiciliés à l’étranger (Anagrafe Italiani Residenti all’Estero, A.I.R.E) n’est plus une condition préalable à l’application de ce régime si la personne en question a séjourné dans un pays disposant d’une convention de double imposition avec l’Italie et a été considérée comme résidente dans ce pays selon les dispositions applicables du traité en cause.
L’impatriation ne concerne cependant que les revenus du travail et l’emploi doit être prévu pour une durée minimum de 2 ans. Le taux de revenu imposable passera pour ces personnes de 50 % (sauf pour les athlètes professionnels) à 30 %, voire 10 % si elles s’installent dans une région de l’Italie du Sud.
Cet avantage fiscal, prévu pour une durée de 5 ans, peut être étendu à 5 années supplémentaires (taxation de 50% des revenus du travail), à certaines conditions (les athlètes professionnels ne peuvent pas bénéficier de ce régime) comme le fait d’avoir un enfant mineur à charge ou d’acquérir un bien immobilier en Italie dans les 12 mois précédant la prise de résidence où à partir de cette dernière date. Concernant le bien foncier, il peut être acquis par l’époux, le conjoint ou même les enfants, en copropriété ou non. En présence de 3 enfants à charge, la réduction est encore étendue à 10% en toutes régions.
S’agissant des chercheurs et des professeurs (soit ceux qui disposent d’un degré universitaire ou équivalent et qui ont déployé des activités dans la recherche ou l’enseignement pendant au minium 2 ans à l’étranger), les allègements fiscaux sont encore plus étendus. L’abattement fiscal, toujours de 90 %, est valable dorénavant pendant 6 ans, contre 4 précédemment. Avec un enfant à charge ou l’achat d’un bien immobilier, il est valable pendant 8 ans, pendant 11 ans avec deux enfants à charge et jusqu’à 13 ans avec au moins 3 enfants à charge. L’inscription dans le registre des expatriés (A.I.R.E) n’est également plus nécessaire.
Les mesures fiscales adoptées par l’Italie rappellent celles mises en place par le Portugal en 2013. En effet, les retraités étrangers peuvent acquérir le statut fiscal de « résident non-habituel » au Portugal afin de bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu de leurs pensions de retraite pendant 10 ans. La condition étant pour les retraités étrangers de séjourner plus de 6 mois dans le pays. De ce fait, le Portugal était devenu ces dernières années une destination à la mode qui pourrait bien se faire détrôner par l’Italie, parfois considérée comme plus agréable pour sa qualité de vie. Sans parler que les impôts successoraux en Italie sont faibles voir nuls et que la fiscalité immobilière peut être très avantageuse (pas d’impôt sur les plus-values après 5 ans de détention, crédit d’impôts de 50% pour les travaux d’entretien et de rénovation, flat tax pour les revenus provenant de la location (cedola secca), etc.).
Avec ce nouveau régime qui ne limite plus les avantages fiscaux aux dirigeants d’entreprises et aux intellectuels, il y a une catégorie de personnes qui profite tout particulièrement de la situation : les sportifs de haut niveau et notamment les footballeurs et les entraîneurs.
En particulier, le mercato italien devient extrêmement attractif pour les joueurs italiens ayant passé au moins deux années à l’étranger, mais aussi pour les joueurs étrangers. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la nouvelle loi a été adoptée 3 jours avant l’ouverture de la saison. Concrètement, la loi garantit une exonération de taxation à hauteur de 50% en cas de nomination dans n’importe quel club de football du territoire. Rappelons que ce sont les clubs qui paient en réalité les impôts de leurs joueurs. Ainsi, pour garantir un salaire net de EUR 20 millions, il « suffira » à la Vieille Dame de Turin de débourser EUR 24.3 millions contre EUR 28.6 millions auparavant. Cristiano Ronaldo avait déjà pu profiter de la « flat tax » en 2018 pour ses revenus de source étrangère, il pourra dorénavant profiter des avantages fiscaux sur son salaire en Italie.
Il est fort à parier que la série A italienne va redevenir un championnat d’un niveau exceptionnel dans les années à venir. Il y a de quoi inquiéter les autres compétitions, y compris l’Espagne avec leur loi Beckham de 2005.
La France notamment qui dispose d’un régime d’impatriés pendant 5 ans sur 30% de la rémunération globale est loin derrière en imposant 5 ans de résidence à l’étranger à leurs footballeurs.
En tous les cas, au-delà du foot qui a toujours été un business colossal au pays de la mozzarella, les italiens ont bien compris que les mesures d’incitation fiscale sont le nerf de la guerre en cette période économique difficile en Europe. Dommage que les lois et les gouvernements en Italie soient aussi instables, refroidissant plus d’une personne tentée par ces mesures incitatives. La Suisse elle, ferait bien de se réveiller au risque de se faire complètement dépasser dans les prochaines années en matière de résidence pour les plus fortunés…
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